Les vœux de Monsieur Palix pour 2014
Avant la séance, les techniciens en place aux commandes, Athéna qui me sourit, les élus présents prêts à monter sur scène tout était en place pour écouter le maire de Bandol à l’occasion des vœux pour cette nouvelle année 2014 marquée par de nouvelles élections municipales.
On aura remarqué que tous les élus n’étaient pas là.
Madame Quilici était tout de même en bonne place dans le public, par contre je n’ai pas aperçu Madame Connat pas plus Monsieur Bogi.
En attendant la vidéo demain, je vous propose ci-dessous l’enregistrement audio.
Le diaporama préparé par Patrick Durville et proposé aux bandolais est dans l’aricle.
J’ai écouté avec attention les propos de monsieur le maire lors de ses vœux et en particulier sur ce qu’il a dit avec aplomb et calme sur la délinquance.
Je n’entrerai pas ici dans une polémique sur l’utilité ou non des systèmes de vidéo surveillance mis en place (et son coût), qui, tous les débats sérieux le disent, constituent une réponse parmi d’autres (mais en aucun cas LA solution) aux questions de délinquance… sachant que la majorité des spécialistes s’accordent à conclure que ces caméras sont plus une aide pour retrouver les auteurs des crimes ou délits qu’un véritable outil de prévention.
Non, ce qui m’interpelle dans les propos de monsieur le maire… ce sont les chiffres qu’il a avancé… Non que ces chiffres soient faux… mais je voudrais bien savoir ce que, derrière ces chiffres, est mis et a été mis.
Dire que les délits commis à BANDOL sont passés de + de 800 en 2009 à un peu plus de 400 en 2013 (je suis d’ailleurs étonné qu’au 10 janvier 2014 monsieur le maire ait les chiffres d’une année qui vient à peine de s’achever, mais admettons qu’il s’agit bien de 2013 et non de … 2012, cela ne changera pas grand chose à mes questions et à mon analyse). Une diminution donc de la moitié en 3 ou 4 ans! Bigre….
Mais diminution de quels délits (les crimes sur BANDOL sur cette période ne doivent pas dépasser les 5 doigts d’une main) ? Quels délits….
Il y a en effet les délits pour lesquels les services de police cherchent le ou les auteurs, ils courent aprés : les cambriolages, les vols de véhicules, etc…
Là la police subit sans pouvoir en maîtriser le flux, encore que (voir plus loin)… la survenance des faits…
Mais il y a d’autres délits… ceux que le jargon policier nomme les IRAS càd les Infractions Révélées par les Services…Il s’agit essentiellement des infractions à la législation sur les stupéfiants (interpellation d’un consommateur de drogue ou d’un dealer) ou des infractions à la législation sur les étrangers (interpellation d’un sans-papiers).Vous comprendrez bien que, si en 2009 par exemple, les services de police ont fait plusieurs opérations de contrôle en matière de stupéfiants…. le nombre de délits constatés dans cette année n’a pu qu’augmenter les chiffres de 2009… et qu’à l’opposé si aucune opération n’a été effectuée en 2012 ou 2013 par rapport à l’année précédente… hé bien le nombre de délits constatés diminue….
Donc livrer des chiffres bruts sans explication sur le contenu précis de ce qu’il recouvre… n’a aucun sens.
Et cette “manipulation” avec les IRAS permet d’aller plus loin. Elle permet, si vous augmentez le nombre d’IRAS (un fait constaté (un IRAS) = un fait élucidé)… de faire grimper le taux d’élucidation ….car par définition une IRAS est TOUJOURS un fait élucidé: l’étranger sans papier qui se trouve dans la rue… ce n’est pas un délit apparent dans les statistiques… cela devient un délit au moment où le policier qui le contrôle constate qu’il est sans papier… De même une personne qui se balade dans la rue avec une barrette de cannabis ne constitue pas un délit apparent… c’est le contrôle de police qui le révèle : infraction révélée par l’action des services… IRAS, mot magique qui permet de faire monter le taux d’élucidation….
Et puis il y a des faits pour lesquels là aussi l’élucidation est quasi automatique: ce sont les violences non crapuleuses… Le voisin qui vous donne un coup de poing suite à un différend de voisinage…le “baston” familial suite à un repas bien arrosé, c’est du 100% élucidé….
Donc que ce soit pour le nombre de délits commis… ou le taux d’élucidation… tout dépend de la nature des délits en cause… Mais de cela monsieur le maire n’a rien dit…
Quant à l’impact de la vidéo protection (terme désormais consacré) sur l’élucidation des délits… déjà en 2009 un rapport officiel concluait:
” Cependant l’impact de la vidéo surveillance sur le taux global d’élucidation des crimes et délits reste encore “modéré”.”
Le débat avait un peu occupé l’espace public dans les mois qui avaient précédé les élections présidentielles, notamment à la suite de certaines affirmations de Nicolas SARKOZY qui avait fait le mauvais choix de citer l’exemple anglais
et quelques mois plus tard c’était la Cour des Comptes qui s’interrogeait sur la vidéo surveillance
En 2011 le Sénat avait aussi insisté, dans le cadre de la loi de finances de 2012, sur la grande prudence qu’il convenait d’avoir en matière de statistiques policières et en particulier de l’état 4001 qui sert de base à la plupart des analyses en matière de vidéo protection
En avril 2013 était déposé à l’Assemblée nationale un rapport très complet relatif à la mesure statistique des délinquances et de leurs conséquences (rapporteurs MM. JEAN-YVES LEBOUILLONNEC (PS) et DIDIER QUENTIN (UMP))
On peut y lire ce savoureux passage:
“• L’état 4001, un outil aisément manipulable
Comme vos rapporteurs en ont fait la découverte, il existe de nombreuses
façons de manipuler, à la hausse comme à la baisse, les statistiques policières.
Ces manipulations interviennent à tous les stades du processus allant de la
commission de l’infraction à sa comptabilisation au sein de l’état 4001.
Les services de police disposent de plusieurs moyens d’agir à la source
pour limiter le nombre de faits enregistrables. Cela peut tout d’abord prendre la forme d’une limitation volontaire du nombre de plaintes. Le refus de prise de plainte, la réorientation de la victime vers un autre service de police, ou encore l’organisation de conditions de dépôt de plainte décourageantes à l’égard des victimes – longues files d’attentes, prise de la plainte par des personnels non spécialisés –, constituent autant de moyens susceptibles de limiter le taux de plainte.
Parmi ces moyens, il en est un dont l’importance numérique n’est pas
négligeable : l’utilisation abusive de la main courante. Sont normalement
enregistrés au sein de ce registre les faits portés à la connaissance des services qui ne sont pas, en tant que tels, constitutifs d’une infraction : des troubles du voisinage, le début de ce qui pourrait s’avérer un fait de harcèlement s’il venait à être répété, le constat du départ du domicile d’un conjoint. Dans les faits, les registres de main courante permettent également de consigner et de dater des infractions dénoncées par une victime qui ne souhaite pas porter plainte. La recommandation voire l’obligation faite à la victime de déposer une simple main courante, en lieu et place d’une plainte, permet de minorer le nombre de faits constatés. Cette pratique n’est pas tout à fait anodine, si l’on considère qu’en 2011 « 290 713 déclarations [concernant] des crimes et délits, dont 68 107 des atteintes aux biens et 125 414 des atteintes aux personnes (hors vols violents) » ont fait l’objet de simples mains courantes. (…)
Par ailleurs, si une plainte est déposée, il est possible de modifier, à la
marge, la qualification pénale des faits pour la faire disparaître de l’état 4001.
La qualification d’un délit en contravention permet de ne pas faire apparaître le
fait constaté au sein de l’état 4001. Une tentative de cambriolage pourra par
exemple être qualifiée de dégradation légère, si une serrure a été forcée.”
(voir pages 42 et s… du rapport… un délice en matière de moyens de faire dire aux chiffres ce qu’on veut… ou presque)
Pour en revenir aux chiffres avancés par monsieur le maire… disons qu’en l’état ils n’ont aucune signification, ne veulent rien dire tant que les éléments qu’ils recouvrent ne sont pas détaillés, que ce soit dans leur évolution dans le temps … trés surprenante (la moitié moins de délit en 3 ou 4 ans… vite donnez nous la recette)… ou encore plus le taux d’élucidation… à moins que monsieur le maire n’ait habilement joué sur les mots:
” Les enregistrements vidéo ont permis de retrouver la moitié de ceux qui ont réalisé ces délits”…..
Ce qui signifierait que sur 400 délits commis en 2012 (ou 2013)…. 200 ont été élucidés… un taux de 50% !!! du jamais vu dans les statistiques de police!
On aimerait donc quelques explications sur de telles chiffres…proprement aberrants en l’état…. Le débat est trop sérieux (et les enjeux notamment financiers importants) pour souffrir l’a-peu-prés, même pour la présentation des voeux de début d’année…ou période électorale…..